DOCERE

Marc Aurèle

« Ne se guider sur rien d'autre, même pour peu de temps, que sur la raison. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 32

« Rappelle-toi depuis combien de temps tu remets à plus tard et combien de fois, ayant reçu des Dieux des occasions de t'acquitter, tu ne les as pas mises à profit. Mais il faut enfin, dès maintenant, que tu sentes de quel monde tu fais partie, et de quel être, régisseur du monde, tu es une émanation, et qu'un temps limité te circonscrit. Si tu n'en profites pas pour accéder à la sérénité, ce moment passera; tu passeras aussi, et jamais plus il ne reviendra »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 40

« Injurie-toi, injurie-toi, ô mon âme! Tu n'auras plus l'occasion de t'honorer toi-même. Brève, en effet, est la vie de chacun. La tienne est presque achevée, et tu n'as pas de respect pour toi-même, car tu mets ton bonheur dans les âmes des autres. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 41

« Qu'est-ce que mourir? Si l'on envisage la mort en elle-même, et si, en divisant sa notion, on en écarte les fantômes dont elle s'est revêtue, il ne restera plus autre chose à penser, sinon qu'elle est une action naturelle. Or celui qui redoute une action naturelle est un enfant. La mort pourtant n'est pas uniquement une action naturelle, mais c'est encore une œuvre utile à la nature. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 43

« Quand tu devrais vivre trois fois mille ans, et même autant de fois dix mille ans, souviens-toi pourtant que nul ne perd une vie autre que celle qu'il vit, et qu'il ne vit pas une vie autre que celle qu'il perd. Par là, la vie la plus longue revient à la vie la plus courte. Le temps présent, en effet, étant le même pour tous, le temps passé est donc aussi le même, et ce temps disparu apparaît ainsi infiniment réduit. On ne saurait perdre, en effet, ni le passé, ni l'avenir, car comment ôter à quelqu'un ce qu'il n'a pas ? Il faut toujours se souvenir de ces deux choses : l'une que tout, de toute éternité, est d'identique aspect et revient en de semblables cercles, et qu'il n'importe pas qu'on fixe les yeux sur les mêmes objets durant cent ans, deux cent ans, ou durant l'infini du cours de la durée. L'autre, que celui qui a le plus longtemps vécu et que celui qui mourra le plus tôt, font la même perte. C'est du seul présent, en effet, que l'on peut être privé, puisque c'est le seul présent qu'on a et qu'on ne peut perdre ce qu'on n'a point. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 43

« La philosophie consiste [...] à veiller à ce que le génie qui est en nous reste sans outrage et sans dommage, et soit au-dessus des plaisirs et des peines; à ce qu'il ne fasse rien au hasard, ni par mensonge ni par faux-semblant; à ce qu'il ne s'attache point à ce que les autres font ou ne font pas. [...] Et surtout, à attendre la mort avec une âme sereine sans y voir autre chose que la dissolution des éléments dont est composé chaque être vivant. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 45

« Vénère la faculté de te faire une opinion. Tout dépend d'elle, pour qu'il n'existe jamais, en ton principe directeur, une opinion qui ne soit pas conforme à la nature et à la constitution d'un être raisonnable. Par elle nous sont promis l'art de ne point se décider promptement, les bons rapports avec les hommes et l'obéissance aux ordres des Dieux. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 52

« Ne conçois point les choses telles que les juge celui qui t'offense ou comme il veut que tu les juges. Mais vois-les telles qu'elles sont en réalité. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 60

« N'agis point comme si tu devais vivre des milliers d'années. L'inévitable est sur toi suspendu. Tant que tu vis, tant que cela t'est possible, deviens un homme de bien. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 61

« La plupart de nos paroles et de nos actions n'étant pas nécessaires, les supprimer est s'assurer plus de loisir et de tranquillité. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 63

« Si l'un des Dieux te disait : « Tu mourras demain ou, en tout cas, après-demain », tu n'attacherais plus une grande importance à ce que ce soit dans deux jours plutôt que demain, à moins d'être le dernier des rustres, car qu'est-ce que ce délai? De même, ne crois pas que mourrir dans beaucoup d'années plutôt que demain, soit de grande importance. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 68

« Va toujours par le chemin le plus court, et le plus court est celui qui va selon la nature. Voilà pourquoi il faut agir et parler en tout de la façon la plus naturelle. Une telle ligne de conduite te délivrera de l'emphase, de l'exagération et du style figuré et artificiel. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 70

« Au petit jour, lorsqu'il t'en coûte de t'éveiller, aie cette pensée à ta disposition : c'est pour faire œuvre d'homme que je m'éveille. Serai-je donc encore de méchante humeur, si je vais faire ce pour quoi je suis né, et ce en vue de quoi j'ai été mis dans le monde? Ou bien, ai-je été formé pour resté couché et me tenir au chaud sous mes couvertues? »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 71

« Dans ces conditions, plus on se dépouille de ces choses et d'autres semblables, plus on supporte d'en être dépouillé, et plus on est homme de bien. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 78

« Il est honteux que, dans le temps où ton corps ne se laisse point abattre, ton âme, en ce même moment, se laisse abattre avant lui. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 91

« Il ne faut pas s'irriter contre les choses, car elles ne s'en soucient pas. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 106

« Creuse au-dedans de toi. Au-dedans de toi est la source du bien et une source qui peut toujours jaillir, si tu creuses toujours. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 109

« Souviens-toi que changer d'avis et obéir à qui te redresse, c'est faire encore acte de liberté. Ton activité, en effet, s'étend selon ta volonté, selon ton jugement et, par conséquent, selon aussi ta propre intelligence. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 116

« Tu souffres à juste titre. Tu préfères attendre à demain pour devenir honnête homme plutôt que de l'être aujourd'hui. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 117

« Voilà pourquoi c'est une citadelle que l'intelligence libérée des passions. »

— Marc Aurèle, Pensées pour moi même, éd. Flammarion, p. 123